Médaille Prix du patient MMXX
Chaque jour, environ 55 Québécois sont victimes d’un accident cardio-vasculaire qui bousculera leur vie. De nombreux défis sont à surmonter dès le séjour à l’hôpital. Le 13e étage du pavillon D du CHUM n’a rien de banal; l’histoire d’un couloir transformé en piste d’entraînement pour les patients.
«Après un AVC, les patients passent 75% de leur temps dans leur lit d’hôpital, inactif, sans interaction cognitive. C’est pourtant le moment le plus important pour bouger, communiquer, être stimulé, c’est essentiel pour récupérer», explique Dre Cécile Odier, neurologue vasculaire.
Inspirée par le concept d’environnement enrichi et les parcours fréquents dans les parcs suisses, son pays d’origine, l’idée a germé dans la tête de la chercheure. Le déménagement au nouvel hôpital a retardé son déploiement.
«C’était une opportunité de s’approprier les grands corridors du CHUM, raconte Judlène Joltéus, infirmière clinicienne. Cet espace immense était vu comme un défaut, il fallait en prendre avantage. S’en servir pour l’empowerment du patient, un jour à la fois, un pas à la fois, une sortie à la fois, une station à la fois.»
Le parcours Locomotive travaille le corps et l’esprit avec des affiches et de chouettes caricatures, dessinées par nul autre que le créatif Jean-Pierre Coallier, patient ayant lui-même subi un AVC en 2009. À travers les stimuli et les exercices, le patient apprend sur sa condition et débute sa réhabilitation.
«Lorsque quelqu’un a un AVC, toute la famille est touchée, rappelle Dre Odier. Les proches deviennent des alliés et nous aident à motiver le patient en comprenant mieux sa réalité. Même les préposés qui font marcher les patients vont utiliser les caricatures. Ce sont des outils simples qui font partie de la réadaptation, autant qu’une heure de physiothérapie.»
Le parcours a été créé en étroite collaboration avec des patients qui ont contribué à toutes les étapes du projet. C’est même une patiente qui travaille pour une agence publicitaire qui a eu l’idée du nom Locomotive, qui fait penser à la neurologie. L’équipe est d’ailleurs très touchée d’avoir remporté le Prix du Patient.
«Je dis à la blague que tout l’hôpital est impliqué, mais ce n’est pas loin de la réalité, c’est une soixantaine de personnes de huit directions différentes. Tout le monde a travaillé pour vulgariser l’information, ils étaient tellement enthousiastes qu’il fallait prioriser les phases», souligne Mme Joltéus qui agit comme pilier transdisciplinaire.
Le projet n’est pas très coûteux, mais tout est calculé, du lavage du marquage au sol, à l’approbation de ce qui est accroché sur les murs, aux pastilles distancées. Le résultat : un environnement stimulant et mobilisateur! La preuve que l’hôpital peut se réinventer grâce aux convictions et aux efforts d’une équipe.
La réussite du parcours intéresse d’autres centres de réadaptation. Le CHUM souhaite aussi en créer pour les unités de neurochirurgie et de gynéco-oncologie. L’équipe n’a pas fini de rêver et souhaite se servir des nouvelles technologies pour aider le patient, avec une baladodiffusion et peut-être même la réalité virtuelle !
*L’équipe interdisciplinaire est composée de : une infirmière clinicienne experte dans la trajectoire de soins AVC (Judlène Joltéus), une neurologue vasculaire (Dre Céline Odier), une physiothérapeute dédiée à l’unité d’AVC (Marie-Andrée Desjardins) ainsi qu’une conseillère senior en soins spécialisés et en recherche clinique (Line Beaudet) et deux patients partenaires (Serge Gareau, Danièle Henrichon). Ergothérapeutes, nutritionnistes, orthophonistes, spécialistes de communication, spécialiste en arts visuels, une psychologue et une sexologue complètent l’équipe.
Tableau : Séquelles AVC
Source : Fondation des maladies du cœur et de l’AVC, 2015